Les potagers domestiques dans l’agglomération angevine
Des surfaces importantes marquées par une répartition hétérogène
par Maxime Marie

Table des matières
De nombreuses recherches ont été conduites en France sur les jardins familiaux à partir des années 1990. Depuis les années 2000, l’attention a davantage été portée sur les jardins associatifs et partagés. A l’exception de quelques-unes, peu d’études ont concerné les potagers domestiques, c’est-à-dire ceux qui se situent dans les jardins des maisons individuelles. Ce dernier type de potagers est particulièrement difficile à appréhender car aucune base de données ne les identifie. Pourtant, notre recensement répertorie un peu plus de 5 000 potagers domestiques dans l’agglomération d’Angers, totalisant environ 17 hectares.
Un inventaire spatialisé et exhaustif
1Comme dans beaucoup d’autres villes, les jardins potagers domestiques d’Angers n’avaient jamais fait l’objet d’un inventaire. Ce dernier repose sur un travail de photo-interprétation réalisé à partir des images haute définition de Google Earth datant de juillet 2022. Les espaces de production potagère ont été identifiés au sein des jardins des maisons individuelles. Leur digitalisation au 400ème a permis de réaliser un dessin précis et fiable de ces espaces. La méthode de photo-interprétation a été reprise à partir de celle déjà éprouvée pour les agglomérations de Caen, Rennes et Alençon (MARIE, 2019).
Source : photo-interprétation Google Images, 2022. Maxime Marie, UMR ESO - UCN, 2024. Atlas Social d'Angers.
Identification des espaces de la production potagère domestique au 1/400ème à partir d’images à très haute résolution
Les surfaces numérisées sont les plus proches possibles des espaces cultivés. Elles intègrent toutefois des espaces non productifs comme les passe-pieds entre les planches de légumes. Dans certains cas, des espaces non productifs, insérés au milieu des planches, font également partie des espaces retenus (petites zones en herbe, collecteur d’eau de pluie, etc.). En revanche, les cabanes ont été systématiquement exclues de la numérisation et leur surface n’est donc pas comptabilisée.
Des surfaces importantes dans l’agglomération angevine
2Les 5 149 potagers domestiques identifiés dans l’agglomération d’Angers représentent une surface totale de 17,25 ha pour une surface moyenne de 33 m². Cette pratique concerne donc 10,5% des ménages qui en ont l’opportunité (c’est-à-dire ceux résidant en maison individuelle avec jardin). Ce recensement montre une distribution géographique assez hétérogène mais marqué par un gradient centre-périphérie (voir ci-dessous). Le centre-ville présente ainsi des surfaces très faibles de potagers domestiques notamment du fait de la faible part de maisons avec jardin dans l’offre de logement. Sur la rive gauche de la Maine, les zones péricentrales de la commune d’Angers, correspondant à l’urbanisation pavillonnaire de la première moitié du 20ème siècle (Saint-Serge-Ney-Chalouère, La Fayette-Eblé), sont marquées par la présence de densités assez faibles de potagers, le plus souvent caractérisés par leur petite dimension (moins de 20 m²). Toujours sur la rive gauche, le nombre et la surface des potagers augmentent à mesure que l’on s’éloigne du centre-ville (quartiers Justices-Madelaine-Saint-Léonard, Montplaisir et jusqu’aux lotissements pavillonnaires d’Ecouflant dans le secteur du parc des expositions). Sur la rive droite de la Maine, les potagers sont plus nombreux et souvent plus grands dans les secteurs pavillonnaires des années 1950-1960 des quartiers de Saint-Jacques, des Hauts de Saint-Aubin et de Belle-Beille. Quatre pôles apparaissent ensuite en périphérie du centre urbain dense de l’agglomération :
- une large zone au sud-est de l’agglomération (communes de Saint Barthélémy d’Anjou, de Trélazé et des Ponts-de-Cé),
- au nord de l’agglomération (commune d’Avrillé),
- le secteur pavillonnaire de Beaucouzé à l’est de l’agglomération,
- le sud-ouest de l’agglomération (commune de Sainte-Gemmes-sur-Loire).
Source : photo-interprétation Google Images, 2022. Données agrégées par carreaux INSEE de 200 mètres. Maxime Marie, UMR ESO - UCN, 2024. Atlas Social d'Angers.
Carte des surfaces cumulées des potagers domestiques en 2022 autour d'Angers
Il s'agit des données carreaux issues des fichiers FILOSOFI de l’INSEE (FIchiers LOcaux SOciaux et FIscaux), accessibles en ligne.
3Le sud-est de l’agglomération présente des densités relativement importantes de potagers domestiques. On constate dans ce secteur que dans plus de 20 % des maisons avec jardin, un potager est cultivé (figure 3). Il est régulièrement de dimension moyenne mais occupe une part importante de la surface cultivable du jardin, ce qui est caractéristique des pratiques populaires de jardinage.
Source : photo-interprétation Google Images, 2022. Données agrégées par carreaux INSEE de 200 mètres. Maxime Marie, UMR ESO - UCN, 2024. Atlas Social d'Angers.
Carte de la part des maisons individuelles pourvues de potagers domestiques en 2022 autour d'Angers
Il s'agit des données carreaux issues des fichiers FILOSOFI de l’INSEE (FIchiers LOcaux SOciaux et FIscaux), accessibles en ligne.
4Au nord cette fois, dans les quartiers pavillonnaires d’Avrillé, la culture du potager domestique s’inscrit encore plus fortement dans le paysage urbain. Les densités sont ici parmi les plus fortes observées dans l’agglomération angevine (plus de 16 % de la surface de potagers de l’agglomération est cultivée dans cette commune). Les potagers de ce secteur sont aussi les plus grands, atteignant souvent des surfaces de plus de 40 m² (carte ci-dessous).
5Le secteur de Beaucouzé affiche un nombre relativement important de potagers, la pratique y est particulièrement développée dans la frange ouest de la commune (urbanisée avant 1990). En revanche, bien que dominée par l’habitat pavillonnaire, le nord de la commune de Bouchemaine et le quartier du Lac de Maine à Angers ne présentent que très peu de potagers. De multiples facteurs peuvent expliquer cette situation : très petites tailles des terrains dans le secteur du lac de Maine, population aisée (et donc moins encline à cultiver un potager de dimension significative) dans le secteur pavillonnaire du nord de la commune de Bouchemaine.
Source : photo-interprétation Google Images, 2022. Données agrégées par carreaux INSEE de 200 mètres. Maxime Marie, UMR ESO - UCN, 2024. Atlas Social d'Angers.
Carte des surfaces moyennes des potagers domestiques en 2022 autour d'Angers
Il s'agit des données carreaux issues des fichiers FILOSOFI de l’INSEE (FIchiers LOcaux SOciaux et FIscaux), accessibles en ligne.
6Enfin, dans le sud-ouest de l’agglomération (commune de Sainte-Gemmes-sur-Loire), la culture du potager est très bien implantée bien que les densités de bâti soient plus faibles (figure 2). Sur un axe reliant le lac de Maine au bourg de Sainte-Gemmes, on constate que plus du tiers des maisons avec jardins dispose d’un potager (souvent de grande dimension).
En conclusion
7Les potagers domestiques représentent une surface importante dans l’agglomération d’Angers, cette dernière est de 17,25 ha soit environ les tiers de la surface des jardins collectifs (23,5 ha). Si l’on compare les agglomérations d’Angers et de Caen (dont les tailles sont très proches), la présence des potagers domestiques est très similaire puisque on constate que 10,5 % des ménages résidant en maison individuelle cultivent un potager contre 11,1 % à Caen, on dénombre aussi 3,5 m² par ménage à Angers contre 3,7 m² à Caen. La culture du potager ne semble donc pas plus développée dans l’agglomération angevine que dans celle de Caen en dépit de l’inscription historique de l’horticulture et du végétal dans le tissu économique local. Les ressorts locaux de cette pratique ne sont en revanche pas nécessairement les mêmes dans ces deux villes : l’histoire ouvrière et industrielle sont plus prégnantes à Caen (et expliquent par exemple en grande partie la répartition des potagers), c’est beaucoup moins le cas à Angers où les liens entre la présence ouvrière historique à l’est de l’agglomération (industrie textile et ardoisière) ne se traduit pas par une concentration des potagers dans cette zone. C’est le secteur pavillonnaire d’Avrillé, moins populaire, qui présente le paysage le plus marqué par le potagers domestiques. Peut-être faut-il y déceler un lien encore vivace de la population résidente avec un milieu agricole dont elle est souvent issue et où l’autoproduction potagère constitue un marqueur culturel très puissant.
Pour citer ce document
Maxime Marie, 2025 : « Les potagers domestiques dans l’agglomération angevine », in H. Davodeau, L. Guillemot & S. Giffon, Atlas Social d'Angers [En ligne], eISSN : 2968-0255, mis à jour le : 17/04/2025, URL : https://atlas-social-angers.fr:443/index.php?id=1258, DOI : https://doi.org/10.48649/asda.1258.
Autres planches in : Végétal, environnement et paysage
Bibliographie
MARIE M., 2019, Estimation de la contribution de la production potagère domestique au système alimentaire local. Enseignements à partir de l’étude des cas de Rennes, Caen et Alençon, VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement, vol. 19, n°2, 28 p. Voir en ligne
MARIE M. et LEMARQUAND D., 2022, Potagers domestiques et autoproduction dans l’agglomération caennaise: une importance sous-évaluée, Atlas Social de Caen, de l'agglomération à la métropole ? Voir en ligne
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